« Il faudrait en finir avec le mythe d’une école où régnait l’ordre et le silence, où les élèves apprenaient tous à lire, à écrire et à compter, et où ils connaissaient les grandes dates de l’histoire de France, les départements avec leur préfecture et leurs sous-préfectures, et les fleuves avec leurs affluents. »
En réalité, les effectifs des classes comprenaient en moyenne plus de trente élèves avec des disparités étonnantes. Ainsi, en Seine-et-Oise, par exemple, une classe sur cinq contenait plus de cinquante élèves. Et si les classes uniques des petits villages étaient moins chargées, on y enseignait à tous les niveaux, avec la difficulté d’une fréquentation irrégulière. Si des progrès considérables avaient été engagés, puisque moins de 5 % des conscrits ne savaient ni lire ni écrire, le certificat d’études ne concernait en réalité que les bons élèves, les seuls que les instituteurs présentaient à l’examen. Et donc on ne comptait qu’un tiers d’une classe d’âge titulaire du certificat d’études. Un diplôme qui, s’il garantissait des apprentissages solides en lecture, écriture, orthographe et calcul, se contentait aussi de connaissances très minces en sciences, en histoire et en géographie, comme le montre l’observation des copies des lauréats. Mais surtout, le sort des autres élèves ne constituait pas une préoccupation pour la société, société pour laquelle il était évident que tous les élèves ne pouvaient réussir. Aucun inspecteur n’aurait reproché à un maître d’avoir de grands élèves juste capables d'ânonner, car l’existence de cancres faisait partie de la normalité. Leur échec n’inquiétait personne puisque la société leur permettait tout de même de se trouver une place. Le rôle du maître, tel que chacun le concevait, était de faire réussir les bons élèves au certificat d’études.
Et le baccalauréat ? Eh bien, en 1913, un peu moins de 8 000 lycéens l’ont obtenu cette année-là. Il n’existait pas de bac technologique ni de bac professionnel. Uniquement un bac général (philosophie ou mathématiques élémentaires), dont l’examen s’étalait sur deux sessions (en juillet puis en octobre) et deux parties (une en première et l’autre en terminale pour ceux qui avaient obtenu la première). Le diplôme sanctionnait un niveau de culture humaniste sans utilité immédiate. Il était l’apanage de l’élite sociale, c’est-à-dire de la bourgeoisie. Être bachelier suffisait à distinguer les jeunes bourgeois dont beaucoup arrêtaient là leurs études sans que cela ne leur nuise pour faire une belle carrière. Et donc une minorité de bacheliers s’engageait dans des études supérieures (41 000 étudiants en 1913, contre 2 millions aujourd’hui). Celles-ci étaient essentiellement tournées vers la médecine et les professions juridiques, et une minorité concernait des études scientifiques, notamment avec l’école Polytechnique, l’école Centrale et Saint-Cyr. Mais cette minorité ne suffisait pas aux besoins en travailleurs très qualifiés de l’économie. L’enseignement primaire supérieur et l’enseignement pratique (écoles des arts et métiers) complétaient ces besoins avec les titulaires du brevet supérieur (pratiquement au niveau du bac) et les diplômes d’écoles professionnelles ou des écoles pratiques du commerce et de l’industrie. Ceux-ci n’apparaissaient pas sur le devant de la scène. Mais la modernité leur doit beaucoup.
Ces réalités méritent d’être diffusées de nos jours, tandis que les médias et le grand public se complaisent dans un discours désespérant sur l’état actuel du niveau d’étude des Français.
En réalité, les effectifs des classes comprenaient en moyenne plus de trente élèves avec des disparités étonnantes. Ainsi, en Seine-et-Oise, par exemple, une classe sur cinq contenait plus de cinquante élèves. Et si les classes uniques des petits villages étaient moins chargées, on y enseignait à tous les niveaux, avec la difficulté d’une fréquentation irrégulière. Si des progrès considérables avaient été engagés, puisque moins de 5 % des conscrits ne savaient ni lire ni écrire, le certificat d’études ne concernait en réalité que les bons élèves, les seuls que les instituteurs présentaient à l’examen. Et donc on ne comptait qu’un tiers d’une classe d’âge titulaire du certificat d’études. Un diplôme qui, s’il garantissait des apprentissages solides en lecture, écriture, orthographe et calcul, se contentait aussi de connaissances très minces en sciences, en histoire et en géographie, comme le montre l’observation des copies des lauréats. Mais surtout, le sort des autres élèves ne constituait pas une préoccupation pour la société, société pour laquelle il était évident que tous les élèves ne pouvaient réussir. Aucun inspecteur n’aurait reproché à un maître d’avoir de grands élèves juste capables d'ânonner, car l’existence de cancres faisait partie de la normalité. Leur échec n’inquiétait personne puisque la société leur permettait tout de même de se trouver une place. Le rôle du maître, tel que chacun le concevait, était de faire réussir les bons élèves au certificat d’études.
Et le baccalauréat ? Eh bien, en 1913, un peu moins de 8 000 lycéens l’ont obtenu cette année-là. Il n’existait pas de bac technologique ni de bac professionnel. Uniquement un bac général (philosophie ou mathématiques élémentaires), dont l’examen s’étalait sur deux sessions (en juillet puis en octobre) et deux parties (une en première et l’autre en terminale pour ceux qui avaient obtenu la première). Le diplôme sanctionnait un niveau de culture humaniste sans utilité immédiate. Il était l’apanage de l’élite sociale, c’est-à-dire de la bourgeoisie. Être bachelier suffisait à distinguer les jeunes bourgeois dont beaucoup arrêtaient là leurs études sans que cela ne leur nuise pour faire une belle carrière. Et donc une minorité de bacheliers s’engageait dans des études supérieures (41 000 étudiants en 1913, contre 2 millions aujourd’hui). Celles-ci étaient essentiellement tournées vers la médecine et les professions juridiques, et une minorité concernait des études scientifiques, notamment avec l’école Polytechnique, l’école Centrale et Saint-Cyr. Mais cette minorité ne suffisait pas aux besoins en travailleurs très qualifiés de l’économie. L’enseignement primaire supérieur et l’enseignement pratique (écoles des arts et métiers) complétaient ces besoins avec les titulaires du brevet supérieur (pratiquement au niveau du bac) et les diplômes d’écoles professionnelles ou des écoles pratiques du commerce et de l’industrie. Ceux-ci n’apparaissaient pas sur le devant de la scène. Mais la modernité leur doit beaucoup.
Ces réalités méritent d’être diffusées de nos jours, tandis que les médias et le grand public se complaisent dans un discours désespérant sur l’état actuel du niveau d’étude des Français.