Maria Ghjentile



Maria Ghjentile

A propos de Maria Gentile et de son époque

Maria Gentile figure en bonne place dans la galerie des héros populaires Corses, en compagnie de Sambucucciu d’Alandu, de Circinellu de Guagnu, de Marcu Maria Albertini du Niolu, de Dumenicu Lucchini -« Ribellu » de Zirubia, et de tant d’autres.

Sa maison, en ruines, est encore visible sur la colline de Monticellu, à Poghju d’Oletta (1).

Qui était donc cette jeune fille surnommée l’Antigone corse ? Quels évènements a-t-elle vécu ? Cette, fort élogieuse, appellation est-elle véritablement justifiée ? C’est ce que nous allons essayer de mettre en valeur.

La Corse en 1769

En ce début d’année 1769, après quarante années d’une lutte aussi épuisante qu’inégale, l’indépendance du jeune Etat corse de Pasquale Paoli vit ses derniers moments. C’est que pour parvenir à annexer la Corse, la France de Louis XV n’a pas lésiné sur les moyens :

– Moyens militaires d’abord avec l’envoi de dizaines de milliers de soldats, parfaitement équipés, le tout appuyé par une flotte qui dispose de mouillages sûrs dans les présides de Bastia et de Saint- Florent mais aussi d’ Algajola, Calvi, Aiacciu et Bonifaziu.

Une disparité de moyens telle qu’elle fera dire à un jeune officier corse en 1789 : « Je naquis quand la patrie périssait, trente mille Français vomis sur nos côtes, noyant le Trône de la liberté dans des flots de sang, tel fut le spectacle odieux qui vint le premier frapper mes regards. Les cris du mourant, le gémissement de l’opprimé, les larmes du désespoir environnèrent mon berceau, dès ma naissance ». Chacun aura reconnu en l’auteur de ces lignes, le jeune Bonaparte…

– Moyens diplomatiques également, avec le traité-alibi de Versailles du 15 mai 1768, qui, sous un semblant de légalité, permettra à Choiseul d’agir à sa guise dans l’île, sans devoir rendre de comptes aux autres puissances européennes. On retiendra, parmi d’autres, la réaction indignée de Voltaire : « Il restait à savoir si les hommes ont le droit de vendre d’autres hommes ; mais c’est une question qu’on n’examinera jamais dans aucun traité ».

– Moyens judiciaires enfin avec l’installation à Bastia, le 24 décembre 1768, la veille de Noël, du Conseil supérieur de justice et de son président Daniel Marc Antoine Chardon, installation prévue par l’édit de Compiègne du 17 juin 1768. Cette institution assurera à la nouvelle administration française le cadre juridique nécessaire permettant de mener la répression sur les populations civiles, la troupe en campagne pour sa part exécutant, sans autres formes de procès, les patriotes armés.

Cette lutte sans pitié contre « les rebelles » s’accompagne, d’une politique de séduction vis-à-vis des Corses, du moins de certains, avides de se faire ennoblir, la monarchie française « achetant à peu de frais une élite désormais zélée à défendre la cause de la France », nous rappelle Vergé- Franceshi dans son Histoire de la Corse.

A travers les réseaux de clientèle c’est, par maillage communautaire, une partie non négligeable du peuple qui se trouvera ainsi inféodé. Le témoignage, en décembre 1768, du chevalier de Lenchères nous renseigne sur la méthode employée : « Il n’y a pas de village, grand ou petit, où il n’y ait eu quelque Capo Popolo qui n’ait reçu de l’argent pour gagner les autres ou pour conseiller la soumission à l’arrivée des troupes ou pour contrarier les levées, sans compter ceux qui prennent ouvertement la solde dans les légions et autres Corps francs… » (2)

On réalise mieux ainsi pourquoi certains ont pu basculer dans le camp d’en face. C’est que, dans une situation d’isolement, sans réel soutien politique extérieur, sans réel développement économique après tant d’années de turpitudes, la Corse de Pascal Paoli n’offre guère de perspectives de carrière intéressantes.

Ces principali, entremetteurs souvent zélés, savent tirer profit des prébendes octroyées par la puissance tutélaire, une des erreurs commises par les Génois à leur encontre ayant peut- être été de laisser tomber en désuétude la benemerenza… En échange ces mêmes habiles notables parviennent à obtenir, non sans mal parfois, la relative docilité de « leurs gens ».

Ce type de comportement politicien, au service d’une ambition personnelle, peut se comprendre.

On ne saurait cependant qualifier d’idéaliste, la démarche qui consiste à abandonner la cause du jeune et déjà moderne Etat corse pour aller se jeter dans les bras d’un monarque absolu.(3)

Voilà en revanche qui rend plus valeureux encore, et bien désintéressé, l’engagement des patriotes paolistes.

Mais l’étau se resserre, particulièrement dans le Nebbiu, région stratégique permettant de contrôler les passages entre Saint- Florent et Bastia par les cols de Teghjime, de Santu Stefanu et de Bigornu plus au sud.

La victoire des Naziunali à Borgu le 8 octobre 1768, si elle ne doit rien au hasard n’en constitue pas moins une divine surprise. Et pour encourageante qu’elle soit, cette bataille n’est ni décisive, comme le sera plus tard, en 1781, la bataille de Yorktown pour les Insurgents américains, ni même suffisamment « fondatrice » comme celle de Valmy en 1792 lors de la Révolution française.

 

Rédigé par Xavier Casciani le Jeudi 6 Juin 2019 à 06:44 | Lu 6589 fois

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